Saviez-vous que Cézanne avait peint 80 fois la Montagne Sainte-Victoire ? Ça c'est de l'obstination...
Roger(S) : Salut Paul ! Tu te présentes ?
Paul : Salut vous deux, je suis Paul Cézanne, né en 1839, je suis peintre postimpressionniste et pré-cubiste.
Roger(S) : Très bien Paul, nous reparlerons de ton métier mais, une question nous turlupine. Es-tu parisien ?
Paul : Moi ? Parisien ? Vous rigolez, je suis sudiste. Je suis d’Aix-en-Provence pour être précis.
Roger(S): Ah… super. Mais tu connais un peu Paris n’est-ce pas ?
Paul : Un peu oui mais j’ai passé la plupart de mon enfance à Aix, mes années collège, lycée, à l’école de dessin et à l’Université de droit. La première fois que je monte à Paris, j’ai 21 ans.
Roger(S) : Tu es passé du dessin au droit, alors ? C’est inhabituel. Raconte-nous un peu.
Paul : Ah oui… En gros mon père ne voulait pas d’un fils artiste donc il m’a demandé de suivre des études de droit. C’est donc ce que j’ai fait… Clairement je n’étais pas épanoui et mon père a fini par céder. J’ai donc pu suivre ma vocation et je me suis dit : quel meilleur endroit que Paris pour un artiste ? J’y ai donc posé mes valises pleines de rêves et d’espoirs en 1861. Malheureusement j’ai vite déchanté. J’ai tenté les beaux-arts mais ils n’ont pas adhéré à mon style apparemment. J’ai donc fini par étudier à l’académie de Charles Suisse.
Roger(S) : Dis donc, quel parcours ! Tu as dû rencontrer du beau monde entre Aix et Paris non ?
Paul : Ah ça oui, j’ai rencontré certains de mes plus fidèles amis comme Émile Zola. Ce cher Émile… Je l’ai rencontré tout jeune alors que j’étais au collège. Il m’a suivi toutes ces années et m’a toujours soutenu coûte que coûte. Sa mère m’a accueilli chez eux quand je suis revenu sur Paris d’ailleurs.
Sinon j’ai connu Camille Pissarro, Auguste Renoir, Claude Monet et bien plus à l’académie Charles Suisse. C’est grâce à eux que je me suis familiarisé avec l’impressionnisme.
Roger(S) : Ça nous donne envie d’avoir un ami comme Zola tiens. Ils t'ont accueilli parce que tu manquais de moyens ? Il faut dire que si les prix de l'immobilier étaient déjà ce qu'ils sont aujourd'hui...
Paul : Ne m’en parlez pas… Quelle galère. Les échecs c’est tout ce que je connaissais à mes débuts… En 1864, j’ai présenté mon premier tableau au Salon, cette institution qui décidait de ce qui est exposable ou non… Après ce raté, je décide de revenir dans mon sud natal et je commence à peindre des natures mortes et des portraits. Ce n’est qu’en 1869 que je remonte sur Paris et que j’y rencontre ma compagne et future femme, Hortense Fiquet, qui deviendra la muse de 45 de mes tableaux. Bref, je retente d’exposer mes peintures au Salon mais ça ne marche toujours pas.
Ce n’est qu’en 1895 que ma carrière décolle quand un grand marchand d’art me repère et consacre une exposition entière à mes œuvres. Mieux vaut tard que jamais, pas vrai ?
Je me suis même obstiné à peindre alors qu’un orage éclatait en haut de la Montagne Sainte-Victoire.
Roger(S) : Quel exemple de persévérance, bravo ! Tu as fini par y arriver, il y a donc quelques toiles réussies dans ton travail...
Paul : Oui bien-sûr, elles sont nombreuses. Je suis très fier de mes portraits. En particulier Portrait de Madame Cézanne pour des raisons évidentes. J’ai beaucoup aimé peindre Les Grandes Baigneuses et La Corbeille de pommes, car les pommes me font penser à mon ami Zola. Pour l’anecdote, quand nous étions au collège, j’ai défendu Émile dans la cour de récré un jour et pour me remercier il m’a offert un panier de pommes. Depuis, les pommes sont devenues très importantes dans mon art.
Roger(S) : Décidément, quelle belle amitié...
Paul : Oui, enfin, je dois avouer que je regrette que mon amitié avec Zola se soit brisée… Nous avons arrêté de nous parler après 1886, quand j’ai été vexé par son livre Œuvres dans lequel j’ai cru qu’il se moquait ouvertement de moi. J’ai été très blessé. Ce n’est qu’à la mort de mon ancien ami que j’ai réalisé ma bêtise.
Roger(S) : C'est marrant, tu ne nous as pas parlé de tes oeuvres de montagne. On confond avec un autre artiste ?
Paul : Non, vous avez raison. Mais cette oeuvre témoigne de mon côté un peu têtu alors je pensais la passer sous silence... C’est le sujet de près de 80 de mes œuvres. Je me suis même obstiné à peindre alors qu’un orage éclatait en haut de la Montagne Sainte-Victoire. Il faut dire qu’elle m’obsédait cette montagne… Pour la peine j’ai choppé une pneumonie et une semaine plus tard, elle aura eu raison de moi. Je m’éteins alors le 22 octobre 1906.
Roger(S) : Ah oui, c'est ce qu'on appelle s'entêter. Comme quoi, il n'y a qu'un pas entre persévérance et entêtement...
Vous retrouverez notamment la première adresse de Cézanne dans l'ancienne rue de l'Enfer. La bien nommée ?
Copyrights :
Montagne Sainte Victoire, Paul Cézanne, 1904 © Courtauld Institute of Art - Londres
Les Grandes Baigneuses, Paul Cézanne, 1898 © National Gallery, Londres
La corbeille de pommes, Paul Cézanne, 1893 © Art Institute of Chicago
Portrait de Madame Cézanne, Paul Cézanne, 1890 © RMN-Grand Palais (musée de l'Orangerie) / Hervé Lewandowski
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